L’idée d’un couple où tout est partagé à parts égales – finances, tâches domestiques, décisions – séduit de plus en plus les jeunes Africains, notamment au Cameroun.
Dans une société en pleine mutation, où les femmes revendiquent autonomie, équité voire égalité, le 50/50 apparaît comme l’idéal d’un couple équilibré et juste.
Seulement, derrière cet idéal qui se situe dans le prolongement de la Déclaration universelle des droits de l’homme, qui dispose en son article premier que « tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits », se cache des réalités complexes. Une complexité dictée et influencée par les principales religions et des traditions profondément ancrées. Le 50/50 est-il vraiment un objectif à atteindre pour les femmes africaines ou un piège de la modernité ?
Un idéal séduisant sur le papier
Le concept du 50/50 repose sur une philosophie simple : les mêmes droits et obligations pour chacun des conjoints dans le couple et à parts égales. Une révolution pour beaucoup. Imaginez un monde où madame et monsieur partagent les tâches ménagères, recherchent systématiquement un consensus pour les décisions à prendre, investissent exactement le même montant pour faire face aux charges du ménage.
Cette aspiration portée par les jeunes générations, reflète une soif de changement. Des femmes camerounaises brillent dans leurs carrières, osent acheter des terrains ou investir dans des start-ups. Le 50/50 s’inscrit donc dans cette dynamique d’émancipation ; mais entre l’idéal et la réalité, le fossé reste souvent immense.
Quand les traditions résistent
Dans beaucoup de foyers africains, le poids des traditions et des injonctions sociales demeure écrasant. Oui, certains hommes affirment vouloir participer davantage aux tâches ménagères, mais il suffit d’un coup de fil de leur mère pour que ces résolutions s’évanouissent. Entre une culture où la virilité masculine est souvent associée à un certain statut et des réalités modernes plus équitables, le tiraillement est palpable.
Le quotidien des femmes africaines reste marqué par une double, voire une triple charge : professionnelle, familiale et domestique. Même dans un système où les dépenses sont partagées à parts égales, les responsabilités domestiques restent largement déséquilibrées. Beaucoup de femmes, même indépendantes financièrement, doivent jongler entre les exigences professionnelles et le rôle de « parfaite épouse ».
Et que dire des finances ?
Si certaines femmes contribuent à égalité avec leur partenaire, voire davantage, le modèle traditionnel du « l’homme pourvoit, la femme gère » reste ancré dans les mentalités. L’homme qui n’assume pas « comme un chef » est souvent jugé par sa famille ou même par sa compagne, ce qui crée des tensions dans la relation.
Les pressions extérieures compliquent encore les choses. Une belle-famille peut juger une femme « trop indépendante » ou un homme « pas assez viril » s’ils ne respectent pas les schémas traditionnels. Ces influences culturelles, souvent invisibles, pèsent lourd sur les jeunes couples qui tentent d’innover.
Comme le dit Youssoupha dans sa chanson Dieu est Grand : « On a nos valeurs et nos traditions, si ton amoureux t’emmène en balade, dis-lui bien que c’est lui qui paiera l’additio». Une phrase pleine d’ironie, mais qui reflète une réalité : dans l’imaginaire collectif africain, l’homme est souvent perçu comme le pourvoyeur principal. Beaucoup revendiquent encore ce rôle, non seulement comme un devoir, mais aussi comme une marque de virilité et de fierté.
Le 50/50 : un calcul froid ou une solution flexible ?
Le problème du 50/50, c’est qu’il est souvent perçu comme un calcul froid. Pourtant, chaque couple est unique. Une femme qui gagne deux fois plus que son mari devrait-elle forcément contribuer « moitié-moitié » ? Et un homme dont le travail laisse peu de temps libre devrait-il autant cuisiner ou ranger que sa femme ?
La clé est peut-être d’adopter une approche plus flexible. Un couple sain devrait pouvoir ajuster ses responsabilités en fonction des capacités et des besoins de chacun, sans chercher à tout diviser en parts égales.
Au-delà du 50/50 : l’équité émotionnelle
Finalement, ce que les femmes africaines recherchent n’est pas forcément une division mathématique des charges, mais un vrai partenariat basé sur :
- La valorisation de l’apport de l’autre, qu’il soit financier, moral ou domestique.
- La communication ouverte sur ses attentes et ses frustrations.
- L’acceptation qu’il y aura des périodes où l’un donne plus que l’autre.
En réalité, l’amour ne se mesure pas à 50/50. Ce que les femmes africaines recherchent aujourd’hui, ce n’est pas une calculatrice dans le cœur, mais un partenaire avec qui construire un avenir où chacune peut être pleinement elle-même. Les couples africains doivent créer leurs propres règles, loin des injonctions venues de l’extérieur. Peut-être qu’un modèle où chacun contribue selon ses moyens et ses capacités, tout en respectant les dynamiques culturelles, serait plus pertinent.
Et vous, quel serait votre modèle idéal ?
Par Mariella D.